Un bon poème nous envole
Vers les sentiments qu’il nous vole;
Lettres et mots d’un cœur de poëte,
En le nôtre qui nous fouette
Jusqu’à notre ardeur intrinsèque.
Panoplie et bibliothèque
Est le poème magnifique:
Merveilles et visions chimériques
Dans un grand désert de passions,
La Source des exaltations.
Le poème est un Sphinx splendide,
Déconcertant l’esprit candide,
Mais illuminant le génie,
Comme cet homme qui hennit,
Fou peut-être et imitateur
Des phantasmes venant du cœur,
Tels les chevaux des rêves lourds,
Destriers du terrifiant Tour.
Des phantasmes et des cauchemars,
Le rêveur n’en a jamais marre;
C’est toute sa vie, son destin;
Il s’y vautre toujours d’instinct.
Celui qui lit un bon poème,
Adore, danse, explose et aime;
Il alimente et engloutit
Tous les chefs-d’œuvre aboutis;
Le berceau de l’Humanité,
L’esprit de la Vitalité!
Le poëte vogue toujours
Sur la vague à l’âme des jours;
Il transforme l’ennui en spleen
Et fait de l’Amour sa doctrine.
Battez des ailes, papillons,
Sortez de son ventre fécond
De romances et de joliesses,
Passez par sa bouche maîtresse;
Le poëte excelle en chansons;
Ses vers sont des notes, des sons
Et des rimes mélodieuses.
Même des choses odieuses,
Les poèmes peuvent en parler,
Éternels colliers perlés,
Chaque émotion est une perle.
Le poëte est un accort merle
Qui chante pour sa belle muse
Et, qu’à son doux regard, s’amuse.
Le bon poème a la beauté
D’un grand cœur magnanime ôté
De la gorge d’une fillette;
L’encre est son sang de maigrelette,
Les rimes sont ses deux yeux verts,
La morale est son sein ouvert.
Nous devenons des séraphins
Lorsque les rimes viennent enfin
À nos oreilles attentives;
Ces fins de vers sont sédatives;
On s’endort, puis on se transporte
Dans, du poème, son aorte.
Un intarissable courant
De denses désirs soupirants
Nous conduisent au cerveau du dieu
Des songes clairs et radieux;
Nous allons ensuite au grand mont
De l’Olympe mythique et blond,
Tout recouvert de feuilles d’or ;
Et, face à lui, nul ne s’endort.
Là, Minerve, Morphée, Vénus,
Les neuf Muses, et cet Orphéus,
Retrouvé, noyé, par les nymphes,
Sans plus une goutte de lymphe;
Puis sans corps, – car sa tête exsangue
Flotte en un Ruisseau vrai, sans gangues.
Le bon poème est un voyage
Vers l’éternité des images;
Le bon poème est cette stance
Divinement belle et intense.
Le poëte, sur son bateau,
Dompte la tempête aussitôt,
Et fait fi de ce phare au loin,
Car il n’a de clarté besoin;
Le bon poème lui susurre
La voie des mers emplie d’Azur.